Régime alimentaire végétarien et performance en apnée ?

régime alimentaire vegan et performances chez l'apnéiste

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je précise n’avoir jamais été végétarien / végétalien. Dans la mesure du possible, j’essaie de ne pas trop m’éloigner des préceptes « Anti-Cancer » de David Servan Shreiber et d’avoir un régime alimentaire acido-basique (j’en parlais dans cet article) avec, bien sûr, des jours OFF et d’autres plus rigoureux. Et puis, je l’avoue, une bonne viande ou un bon poisson de temps en temps reste un plaisir.

Pourtant, il y a un mois, tout change ! Une amie m’appelle, hyper excitée, pour me dire que « sur Netflix il y a un super documentaire sur les performances sportives et les protéines animales, franchement tu devrais le regarder, moi j’ai arrêté la viande, c’est génial ».

Bref.

J’imagine que certains d’entre vous en ont entendu parler, il s’agit du documentaire « The Game Changers », sorti en 2018, réalisé par Louie Psihoyos et produit par Jackie Chan, Arnold Schwarzenegger (végétalien !) et James Cameron. Si vous ne l’avez pas encore vu (et que vous avez Netflix), je vous le recommande. « The Game Changers » a radicalement changé mon quotidien depuis une quinzaine de jours et, si je n’ai pas encore eu l’occasion de tester les bienfaits de mon nouveau régime alimentaire sous l’eau (vidange annuelle), je l’ai fait en salle et en nage : c’est le jour et la nuit. D’ailleurs, même au quotidien, c’est différent : je dors mieux, j’ai beaucoup plus d’énergie, meilleure mine, je stresse moins, je suis d’humeur constante, j’ai perdu du gras sans effort alimentaire (j’ai même le sentiment d’être bien mieux rassasié, en fait) et j’en passe.

Le régime alimentaire est un choix personnel. Le propos de cet article n’est pas de vous dire d’arrêter de manger de la viande. Je relaie juste mon expérience récente et tâche d’apporter des éléments expliquant pourquoi réduire sa consommation de protéines animales joue directement sur les performances sportives et, plus que ça, sur la santé en général.

Je pense que cet article intéressera ceux qui souhaitent augmenter leurs performances mais, de manière générale, il me semble fondamental que les apnéistes disposent de ces connaissances. Pourquoi ? Parce qu’en apnée, on est en circuit fermé. L’énergie (limitée) que nous utilisons pendant l’effort provient :

  • Du carburant qu’est l’alimentation ;
  • Du comburant, qu’est l’air (O2).

Cette énergie doit nécessairement être optimisée. C’est pourquoi nombreux sont ceux qui travaillent en salle et à côté pour développer leur capacité pulmonaire (partir avec davantage d’O2), leur système cardio vasculaire (optimiser le dispatch d’O2 pendant l’effort), leur technique de nage (optimiser le geste athlétique pour consommer moins d’O2). C’est dans cette même logique que l’alimentation intervient : avec le bon carburant, la performance est optimisée ; sans le bon carburant, vous freinez les efforts réalisés à côté.

Alimentation-sportive-performance-apnée

Casser le mythe !

• La viande n’est pas le bon carburant de notre corps !

Des recherches récentes, permises grâce aux nouvelles technologies, ont porté sur l’analyse des outils, dents et os de nos ancêtres et ont permis de déduire que la paléo nutrition était principalement végétale.

L’être humain n’est pas, génétiquement et physiologiquement, conçu pour manger de la viande, mais des végétaux :

  • Longueur des voies digestives. Les voies digestives de l’être humain sont bien plus longues que celles des carnivores : 15 fois la longueur du corps chez l’être humain contre 4 fois celle du corps chez les carnivores. Ce trajet permet de digérer fibres et plantes, dont le traitement est plus long que celui de la viande ;
  • Pas de production de vitamine C. L’être humain ne produit pas sa propre vitamine C, il doit la récupérer dans les végétaux, ce qui témoigne de notre dépendance vitale à ces derniers ;
  • Notre vision. Notre dépendance aux végétaux explique pourquoi notre vision est trichrome, alors que les carnivores ont une vision dichromatique : nous voyons plus de couleurs que les carnivores, ce qui s’avère essentiel lorsque nous devons trouver des fruits mûrs et frais ;

Contrairement à vision des carnivores, dichromatique, l'homme a une vision trichrome, qui lui permet de répérerles végétaux frais et mûrs dans son environnement immédiat.

  • Notre dentition. Les carnivores ont des dents distinctes, en forme de lame de ciseaux qui déchiquettent la viande alors que l’homme a des dents carrées, lobées bassement, destinées à broyer les végétaux.

Dentition de l'etre humain VS dentition d'un carnivore, casser le mythe

• L’exemple des gladiateurs romains

Une étude a été menée par des archéologues, après avoir récupéré les restes d’environ 70 gladiateurs romains. L’étude porte sur l’analyse de 500 ossements dans lesquels les chercheurs ont retrouvé une densité minérale haute, témoignant d’un entrainement physique intense et d’un régime alimentaire de haute qualité. Ce régime alimentaire valu aux gladiateurs le surnom de « Hordearii », qui signifie « mangeurs d’orge et de haricots ». Les gladiateurs romains étaient majoritairement végétariens.

• D’où vient le malentendu protéine animale = force musculaire ?

En 1800, le chimiste allemand Justus Von Liebig (rien à voir avec la soupe 😉 émet l’hypothèse que l’énergie du corps humain vient de la protéine animale et que les végétariens sont incapables d’efforts prolongés. Cette hypothèse, non démontrée par la science, devient une forte croyance qui inspire les premières recommandations en protéines de l’USDA, faisant alors de cette hypothèse une « vérité » qui sera progressivement reprise et exploitée par l’industrie du bétail et le lobby agricole. Lorsque la science démontre que cette théorie est fausse et que les muscles ont pour principal carburant les glucides issus des végétaux, il est trop tard.

Ci-dessous, le graphique des apports nutritionnels quotidiens recommandés pour un non sportif et un sportif.

Les apports énergétiques de base, indispensables au bon fonctionnement de l'organisme

L’énergie, on le voit, provient principalement des glucides, sous forme de glycogène, que nous stockons dans nos muscles. Si on sacrifie les glucides pour des protéines, on développe une carence qui entraine fatigue chronique et perte d’endurance1.

Combattre les idées reçues !

Idée reçue n°1 : si j’arrête la viande, je vais être en déficit de protéines.

Une protéine est une chaine d’acides aminés essentielle à notre organisme. Certaines protéines ne sont pas produites par notre corps : nous devons donc les absorber par la nourriture. Il existe 2 types de protéines :

  • Les protéines végétales,
  • Les protéines animales.

Comprendre cela c’est comprendre que réduire ou arrêter de manger de la viande n’impactera pas votre apport quotidien en protéines, mais changera simplement la source de votre apport. Un verre de lentilles cuites ou un sandwich au beurre de cacahuètes contiennent plus de protéines que 90 grammes de boeuf ou 3 gros oeufs. Les protéines animales viennent des protéines végétales : les protéines que l’on retrouve dans un steak viennent de la nourriture mangée par la vache et qui se trouvent dans l’herbe : l’animal n’est qu’un intermédiaire !

Ou le sportif apnéiste peut il trouver des protéines végétales

 

proteines végétales et performances sportives et en apnée

La plus grande étude2 comparative menée à ce jour montre que non seulement le végétalien moyen a assez de protéines dans son organisme mais et surtout, qu’il en a 70% de plus que nécessaire !

Niveau de protéines dans l'organisme d'un végétalien moyen et d'un carnivore.

Idée reçue n°2 : les protéines végétales sont de moins bonne qualité que les protéines animales.

Cette idée reçue repose sur l’argument qui stipule que la protéine végétale serait incomplète et ne donnerait donc pas à l’organisme la quantité nécessaire dont il a besoin : c’est une erreur. Différentes recherches ont montré que toutes les plantes contiennent les acides aminés en différentes quantités et qu’il faut simplement varier les sources végétales pour en apporter la quantité nécessaire à l’organisme. L’intérêt de varier les sources réside également dans le fait (bon sens) que chaque plante, légume, fruit apporte des vitamines et minéraux différents et nécessaires à l’organisme. D’autre part, le consensus mondial à ce sujet est que les acides aminés provenant de source animale tendent à multiplier plus rapidement les cellules de notre organisme, ce qui multiplie, par un processus identifié, les risques de cancer3.

Idée reçue n°3 : on ne trouve la vitamine B12 que dans la viande.

Il est dit que la vitamine B12, nécessaire à l’organisme, est uniquement disponible dans la viande, ce qui est encore une erreur. La vitamine B12 n’est pas fabriquée par les animaux mais par une bactérie que consomme les animaux et qui se trouve dans le sol et l’eau. Comme pour la protéine, les animaux sont également, ici, des intermédiaires. Avant l’agriculture industrielle, animaux et humains obtenaient de la B12 en mangeant les traces de boue sur les aliments ou en buvant l’eau des rivières et des ruisseaux. Mais aujourd’hui, parce que pesticides, antibiotiques et chlore tuent la bactérie qui produit la vitamine B12, les animaux doivent prendre des compléments alimentaires de B12. Et pour les humains, c’est pareil : le meilleur moyen d’avoir suffisamment de B12 dans l’organisme n’est pas de consommer de la viande, mais des compléments alimentaires de B12. Des chiffres montrent que 39% des personnes testées, y compris des carnivores, ont peu de B12.

Idée reçue n°4 : si je suis sportif, il me faut des protéines animales.

Sport, performance sportive et protéines animales

L’idée reçue, en nutrition sportive, c’est de considérer que la protéine animale permet d’être fort et d’atteindre de grandes performances. Cette idée est fausse. De nombreuses études, dont celle de l’université d’Oxford4, ont montré que :

  • Les œstrogènes contenus dans les aliments animaliers (poulet, œufs, produits laitiers) ont un réel impact sur notre équilibre hormonal. Boire du lait de vache augmente notre taux d’œstrogène de 26% en 60 minutes et réduit le taux de testostérone de 18% dans le même délai ;
  • Une alimentation à base de produits animaliers augmente le taux de cortisol de l’organisme, hormone du stress, causant simultanément une baisse de la masse musculaire et une hausse de la graisse corporelle ;
  • Les personnes ayant remplacé la viande par des aliments riches en glucides ont réduit leur taux de cortisol de 27% ;
  • Un entrainement avec poids, pendant 8 semaines, a montré que les personnes consommant une quantité normale de glucides gagnent 1,3 kilogrammes de masse musculaire alors que celles qui en prennent peu perdent progressivement de la masse musculaire ;
  • Les glucides non transformés (bananes, avoine, patate douce, etc.) entrainent une réduction de la graisse corporelle.

Protéines animale, végétale et performance en apnée

• Alimentation, fonction endothéliale et performance en apnée

Ce que l’on mange avant un effort a un impact majeur sur la performance, car il y a une corrélation directe entre le repas et la fonction endothéliale. L’endothélium :

  • Contient le sang à l’intérieur des vaisseaux sanguins ;
  • Met en place les échanges de substances nutritives avec le milieu intérieur. L’endothélium sait si un groupe musculaire ou un organe spécifique a besoin de nutriments et y pourvoit (dilatation) ;
  • Régule le flux sanguin dans tout le corps (oui, ce même flux sanguin qui dispatch l’O2 pendant ta performance, ami apnéiste).

Lorsque l’endothélium est déficient, il se dilate mal, le flux sanguin est moins bien régulé, l’organisme n’est pas nourri de manière optimale par rapport à l’effort demandé. En conséquence, la performance est impactée.

Une expérience a été menée, pendant 2 jours, par le Dr Robert Vogel5 sur 3 joueurs de football des Dauphins de Miami.

  • Le premier jour, les joueurs ont mangé des burritos avec des protéines animales (viande de bœuf bio, de qualité). Le second jour, les joueurs ont mangé des burritos ne contenant que des protéines végétales ;
  • Chaque jour, une prise de sang a été faite et le sang a été placé dans une centrifugeuse afin de pouvoir en séparer les éléments figurés (plasma, gel, cellules rouges).

le régime alimentaire à base de viande et sans viande et ses conséquences sur l'organisme via le sang

Les résultats parlent d’eux-mêmes : si l’on peut voir à travers le plasma, c’est qu’il contient peu de graisses, que le sang est fluide, la fonction endothéliale va donc bien fonctionner, le muscle va être nourri de manière optimale pendant la performance. Pousser le raisonnement à l’apnée n’est pas compliqué : un repas à base de protéine animale freine le dispatch d’O2 à l’organisme pendant l’apnée, alors que c’est précisément à ce moment là que la distribution devrait être optimale. Le sang s’éclaircit à nouveau 6 à 7 heures après l’ingestion d’un repas à base de protéine animale. Imaginez donc que si vous buvez du lait de vache ou de chèvre le matin, que vous mangez un poisson ou une viande à midi et, qu’à nouveau, vous prenez un produit animal le soir, vous ne pourrez jamais donner le meilleur de vous-mêmes pendant une prise de performance.

Analyse sanguine avec un repas à base de viande et un repas sans protéine animale

Éléments figurés du sang après un repas à base de protéines végétales (à gauche) et animales (à droite).

L’expérience du Dr Vogel a été soutenue par de nombreuses études mesurant l’impact d’un seul repas sur le flux sanguin. Alors que la consommation d’un hamburger réduit les performances de la fonction endothéliale de 27% et augmente le taux d’inflammation de l’organisme de 70%, les protéines végétales ont un effet radicalement opposé : optimisation de la fonction endothéliale et baisse du risque d’inflammation de l’organisme, qui cicatrise et récupère mieux. Selon cette même étude, boire un jus de betterave avant l’entrainement permet au sujet :

  • De faire un cycle 22% plus long,
  • De faire un développé-couché avec 19% de poids total en plus.

• Alimentation et récupération chez le sportif et l’apnéiste

La protéine animale est emballée dans des molécules inflammatoires, comme la Neu5Gc, l’endotoxine ou le fer hémique. Une étude américaine portant sur 130 000 patients a montré que l’absorption d’1mg par jour de fer hémique est associé à 27% d’augmentation du risque de maladie coronarienne.

absorption de fer héùique et risque de développement de maladie coronarienne

Lorsqu’on consomme de la viande, le processus chimique qui se met en place pour la digestion change notre microbiome et produit des médiateurs inflammatoires comme l’oxyde de triméthylamine (OTMA), qui joue un rôle clé dans le développement de la maladie cardiaque. Les conséquences sont plurielles tant sur la performance et la récupération que sur la santé :

  • Le fonctionnement des artères est diminué par la formation de plaques,
  • L’inflammation réduit le débit sanguin,
  • Dans les muscles et les articulations, l’inflammation peut augmenter la douleur et retarder la guérison.

formation de plaque dans les artères, performance sportive, apnée

La protéine végétale est enveloppée d’anti-oxydants, de produits phytochimiques, de minéraux et de vitamines. Autant d’éléments qui optimisent le microbiome, l’approvisionnement du sang en nutriments, la performance globale du corps et sa récupération après un effort.

anti oxydant d'un régime alimentaire vegan améliorant la performance chez le sportif

Une alimentation majoritairement végétale permet :

  • De réduire l’inflammation de l’organisme en à peine 3 semaines,
  • D’optimiser la croissance des vaisseaux sanguins dans les tissus abimés et la formation de nouveaux vaisseaux sanguins dans les tendons et les muscles, stimulant le système immunitaire et assurant la bonne oxygénation de l’organisme,
  • De combattre l’infection et l’inflammation.

Tous ces éléments contribuent à une meilleure forme générale, une plus grande endurance et une récupération plus rapide, ce qui est fondamental pour les sportifs et les apnéistes : plus vite on récupère, plus vite on peut retourner à l’entrainement et progresser !

Apnée et santé, photo André Musgrove

Pour ceux qui le souhaite, je vous conseille simplement d’essayer, soit 1 à  2 jours par semaine, soit 1 semaine d’affilée (7 days vegan challenge), de faire le test de ne manger que vegan. Vous vous rendrez compte, par vous mêmes, au quotidien et pendant vos séances de sport et d’apnée, de la différence. On se sent mieux très rapidement, dès la digestion du premier repas en fait, ce qui ne cesse de me rappeler – puisque tout est encore très récent – à quel point la nourriture est l’essence même de notre bon fonctionnement et de notre forme !

Note : j’en profite pour remercier Thibault M. pour son mail du 17/01 ! Je ne prends pas (encore) le temps de répondre aux mails (je suis constamment en manque de temps en ce moment), mais je vous lis tous et vos pensées comme votre intérêt pour mes articles sont autant d’encouragements à continuer à alimenter ce blog régulièrement ! Merci à tous.

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Références :

1 Dr James Loomis, médecin d’équipe, World series, Superbowl

2 Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics 113 (12) : 1610-9

3 Dr Walter Willett, Chair of Nutrition, Harvard University

4 « The Oxford vegetarian study : an overview » – Paul N. Appleby, Margaret Thorogood, Jim I. Mann, Thimoty JA. Key

5 Coprésident du sous-comité de la NFL sur la santé cardiovasculaire

© Alex Voyer, image principale de l’article

3 réflexions sur « Régime alimentaire végétarien et performance en apnée ? »

  1. Merci pour ce formidable article !
    Vegan depuis plus de 4 ans je confirme, manger 100% végétale est bien meilleur pour mon corps, j’ai continué à pratiquer la boxe anglaise (à Vaulx-en-Velin) pendant 4 ans avec de meilleurs performances et moins de fatigue.
    Je me sent également mieux dans ma tête (plus optimiste et heureux) et je constate même une différence bénéfique sur le plant sexuel (libido, andurence…).

    Bref n’hésitez pas à franchir le pas, c’est l’une des meilleurs choses que l’on peux faire pour aider les animaux, réduire notre impact sur l’environnement et ça ne peut être que bénéfique pour notre santé ??

  2. Bonjour Gwen,
    Merci pour cette vidéo intéressante. A date, je n’ai pas retrouvé de liens d’interêts de Julien Venesson, je suis ravi de relayer cette vidéo du coup. Pour tout ce qui est en rapport avec Glucides / Lipides / Protéines, mon amie tient un blog (elle aussi) assez sympa sur le sujet (régime cétogène). Je voulais écrire un article sur ce sujet (régime KETO et perfs en apnée) car je m’y suis mis (forcément ?). Je n’ai pas encore eu le temps de rédiger l’article, mais pas mal d’infos directement sur son blog, également : https://newketo.blog/notions-de-base-les-proteines/

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